Points supplémentaires abordés pendant le CTSD :

L’école a vécu et vit encore une situation exceptionnelle à tout point de vue. Enseignements à distance et maintien d’un lien scolaire mis en place dans l’urgence, relation aux élèves et aux familles modifiée, technologies d’information et de communication utilisées et investies plus ou moins facilement, accueil des enfants des personnels soignants.
La période a montré et montre encore les capacités de création, d’innovation, d’adaptation et d’expérimentation de la profession. Mais elle a montré aussi les limites fortes d’un enseignement à distance notamment pour des enfants qui n’ont pas à disposition les conditions matérielles nécessaires ou encore l’accompagnement voire la disponibilité de l’environnement familial.
Cependant, si les enseignantes et les enseignants ont joué un rôle essentiel durant cette période, ils sont très loin d’avoir bénéficié des moyens et du soutien nécessaires de la part du ministère. Nationalement, plus des trois quarts d’entre eux considèrent qu’il était difficile d’exercer leur métier durant le confinement. Ils n’ont pu compter que sur eux-mêmes et sur leurs collègues. Plus du tiers d’entre eux déclarent n’avoir eu aucune relation avec l’institution, tandis que près de trois sur quatre n’ont pu disposer d’outils institutionnels facilitant le travail.
C’est pourquoi cette période professionnelle compliquée et intense, conjuguée à un processus de déconfinement des écoles prématuré et mal préparé, a conduit au constat d’une profession extrêmement inquiète d’une reprise de l’école le 11 mai. Une inquiétude partagée au même niveau par les parents d’élèves. A l’origine de cette inquiétude, on retrouve pêle-mêle le risque d’être à l’origine d’une seconde vague épidémique, la grande difficulté à faire appliquer les gestes barrières et l’impossibilité de respecter les plans de reprise à la lettre avec de jeunes enfants notamment en maternelle, le brassage d’adultes avec de nombreuses rencontres quotidiennes, la perspective d’une école réduite à une mise en application du protocole sanitaire sans jeux ni interactions, les écoles en « zone rouge » sans traitement spécifique… Lors de la visite du Président de la République et du Ministre de l’Éducation Nationale dans une école avec des enfants de soignants triés sur le volet et formés aux gestes barrières depuis un mois, pas moins d’une demi-douzaine d’entorses au protocole ont eu lieu en 30 min !
Le ministère doit prendre en compte cette inquiétude et s’interdire toute pression sur les personnels. Il faut faire confiance aux équipes sur le terrain, les mieux à même de confronter exigences sanitaires et pédagogiques aux réalités de leur école.
Il faut aussi laisser le pouvoir d’agir aux enseignants et s’appuyer sur leur expertise, leur capacité collective à effectuer les choix pédagogiques qui permettent la réussite de tous et particulièrement des élèves issus des milieux populaires.
Et ceci en s’appuyant sur les éclairages de la recherche dans son ensemble.

Désormais, nous attendons les mesures des autorités concernant la poursuite éventuelle du déconfinement. Au vu des précédents vagues d’injonctions, parfois contradictoires, nous sommes toujours aussi inquiets de devoir subir les cascades d’ordres et de contrordres, tout au long de la chaîne hiérarchique, bien souvent déconnectés du terrain. Elles sont la marque de fabrique de cette méthode de gouvernance qui renvoie, sous le voile d’une prétendue autonomie, la responsabilité à l’échelon de l’exécution alors que les lignes directrices restent définies et les moyens contrôlés par la techno/bureaucratie.
Aussi, les premiers signaux de la préparation du monde éducatif « d’après » nous sont déjà parvenus et les projets du ministère Blanquer sont restés les mêmes : toujours aussi inadaptés et dangereux pour l’Institution et le service public.
Ainsi, afin de permettre la reprise économique et assurer la sortie du confinement, le ministre de l’Éducation Nationale a décidé de reconceptualiser la journée des élèves au prétexte de rester en conformité avec le protocole sanitaire. Ce dernier imposant des groupes restreints d’élèves en présentiel classe, comment rendre alors possible la reprise du travail pour les parents ? Il a positionné 4 temps différents pour les élèves : en classe – en télé enseignement à la maison – en étude – sur les activités 2S2C (Sport, Santé, Culture, Civisme). Si les deux premiers sont organisés par les équipes enseignantes, les deux suivants ne sont que facultatifs, là où les collectivités locales décident de les mettre en place. Le ministre tente un coup de poker et instrumentalise la situation pour avancer dans son projet : les enseignements qui sont pour lui « fondamentaux » (les maths et le français) incombent aux professeurs des écoles, et le sport et la culture doivent être délégué.es aux collectivités territoriales.
Cette externalisation de l’EPS et de la culture renforcera les inégalités puisque les 2S2C ne seront pas proposées sur tout le territoire et qu’elles auront un coût pour les collectivités et donc pour les familles. Alors qu’enseignées au sein de la classe sous la forme actuelle, ces disciplines sont dispensées à tout.es les élèves, sans aucune distinction, par des enseignant.es qui les connaissent parfaitement.
Les 2S2C ne sont donc pas la première tentative de déposséder les enseignant.es de l’enseignement du sport et de la culture. Même s’ils sont présentés aujourd’hui comme un dispositif transitoire, la situation actuelle ne permet pas de savoir dans quelles conditions se déroulera la rentrée de septembre. Si le protocole sanitaire perdure encore plusieurs mois, cette option d’externalisation de l’EPS et de la culture risque d’être utilisée et de se voir ancrer dans des textes officiels
Si les 2S2C ont été annoncées par le ministre comme un élément marquant de la reprise, la pertinence du dispositif n’a pas été reçu de la même façon par les collectivités. Qu’en est-il, Monsieur le Directeur, de la signature de conventions avec les collectivités pour la mise en place tels projets dans notre département ?